lundi 7 février 2011

L'ennui à l'école

Au quotidien, 85 % des jeunes enseignants constatent un manque d'intérêt des élèves dans leurs classes. L'ennui est un des sentiments les plus partagés à l'école. Un des plus anciens aussi. Mais, si autrefois on s'ennuyait poliment, aujourd'hui le chahut a laissé la place à des comportements plus agressifs.
Les élèves – une partie (un sur deux) d'entre eux au moins – s'ennuient à l'école. Le constat est probablement aussi vieux que l'école elle-même car partagé par des générations d'élèves qui n'ont attendu qu'une seule chose: la sonnette de quatre heures qui annonce la fin des cours. Mais alors, pourquoi se pose-t-on aujourd'hui la question sur "l'ennui à l'école"?

Un élève qui s'ennuie est un élève qui décroche: hier il fuyait dans des rêveries agréables, aujourd'hui il devient souvent perturbateur. L'ennui est refusé et accusé bruyamment par des jeunes qui ont des habitudes de "zapping", de rapidité et qui baignent dans une société de loisirs. Le remède: il faut intéresser les élèves, donner plus de sens aux cours. D'accord, mais comment faire? Faut-il baisser la barre? Faut-il remplacer l'éducation par de l'animation, le jeu ou l'amusement tout court? Certainement pas! L'effort et le travail personnel des élèves restent nécessaires.
Il est évident que l'ennui, s'il a toujours existé, s'est transformé: "Les élèves avaient appris à s'ennuyer poliment. Ce qui a changé c'est que les élèves l'expriment aujourd'hui d'une manière qui n'est pas toujours acceptable", explique Philippe Meirieu, chercheur en sciences de l'éducation. Le chahut a laissé la place à des comportements plus provocants, plus agressifs. Et on le montre ouvertement: usage de baladeur, jeux vidéo, lecture de magazines en plein cours… Du même coup, les professeurs le vivent, eux aussi, très difficilement: selon une enquête, réalisée en mars 2001, 85 % des jeunes enseignants constatent régulièrement un manque d'intérêt de la part des élèves. Selon une autre enquête, réalisée en mars 2002, 33 % des professeurs de tout âge placent un manque de motivation comme la principale difficulté dans leurs relations avec les élèves.
Les élèves eux-mêmes ne manquent pas de signaler la profondeur de leur ennui, lorsqu'on le leur demande. Ainsi, d'après une enquête, ils semblent détester la grammaire, l'orthographe, les dates en histoire et les mathématiques. Puis, il y a les disciplines qui, selon leurs propres mots, les "endorment", comme la géographie, l'histoire et la littérature par exemple. Leur critique porte également sur certaines activités: 72 % des élèves n'aiment pas mémoriser des textes, 61 % n'aiment pas étudier des phénomènes trop éloignés dans le temps ou l'espace de leur mode de vie.
"Pour les élèves, la vie est ailleurs", résume Jacques Birouste, professeur de psychologie et auteur d'une enquête sur l'ennui des lycéens technologiques. "Ils ont souvent le sentiment de passer d'une classe à l'autre, d'une explication à une autre… sans faire le lien. Quel rapport existe-t-il entre la chimie et les mathématiques? Entre l'histoire et la géographie? Et puis… à quoi bon apprendre des langues, traduire des textes grecs et latins, résoudre des problèmes de mathématiques?…" Voilà en fait le fond du débat: l'élève s'ennuie surtout parce qu'il ne comprend pas pourquoi on lui enseigne telle ou telle discipline.
Beaucoup d'initiatives ont été prises ces dernières années pour réveiller l'attention des élèves: pour les classes inférieures on a élaboré des itinéraires de découverte; pour les classes supérieures on a prévu des travaux personnels (à réaliser seul ou en petits groupes) autour de toute une série de thèmes qui peuvent intéresser les jeunes. On a introduit de nouvelles technologies dans les classes afin de rendre plus agréables et plus intéressantes les matières souvent jugées trop abstraites, difficiles et… ennuyeuses. L'introduction de la littérature de jeunesse devrait toucher des élèves qui autrement risqueraient de rester indifférents à la lecture. Les manuels aussi ont été transformés: on a laissé tomber les détails pour ne retenir que l'essentiel. Ainsi ils sont devenus plus lisibles, plus agréables.
Les enseignants, eux, sont divisés. D'une part il y a les défenseurs de "la discipline et de l'exercice" pour lesquels la répétition est au-dessus de tout; d'autre part il y a ceux de "l'intérêt des jeunes" pour lesquels le travail scolaire doit d'abord partir de l'élève. Bien sûr, comme toujours, le bon maître n'est-il pas celui qui est capable de combiner les deux?
L’ancien ministre de l'Éducation nationale, Luc Ferry – qui avoue s'être lui-même "ennuyé énormément à l'école – ne veut cependant pas commencer une 'chasse à l'ennui'. "La culture scolaire n'est pas faite – a priori – pour amuser les élèves, pour ça il y a d'autres moyens. Certains apprentissages sont difficiles", explique-t-il pour justifier l'absence de désir dans certaines disciplines, certaines activités. "C'est l'ennui lié à l'absence de sens qu'il faut combattre. Lorsque l'élève ne voit pas la signification de ce qu'il apprend, lorsqu'il a le sentiment que toutes ces connaissances ne servent à rien… c'est là que cela devient dangereux", affirme-t-il encore.

Source: LeMonde

2 commentaires:

  1. je trove cet article très interessan!!
    j'aime la phrase "l'eleve s'ennuie surtout parce qu'il ne comprend pas pourquoi on lui enseigne telle ou telle discipline".
    je pense qu'il est juste trouver d'initiatives pour rendre plus interessant les leçons!

    je suis un eleve ennui!

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  2. Pourquoi tu t’ennuies ? Comment peux-tu expliquer ton manque d’intérêt ? Quelles activités pourraient réveiller ton attention ?

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