lundi 5 mars 2012

Etre Journaliste


Jacques Paugam : Qu’est-ce qui vous paraît essentiel à dire, François d’Orcival, sur votre domaine d’activité aujourd’hui, retenons donc le journalisme et la presse ?
François d’Orcival : Ce qui me frappe, c’est que dans ce métier, naturellement, beaucoup de choses ont évolué : évolué les supports, évolué les techniques de rédaction, évolué la fabrication des journaux comme des articles, etc. Ce qui subsiste, c’est toujours le talent et j’ai des confrères jeunes aujourd’hui qui sont des garçons et des filles de grand talent.
Ce qui me frappe aussi, c’est le grand danger du conformisme. Cela existait autrefois. Je trouve que c’est encore plus fort aujourd’hui. Pourquoi ? Parce que nous vivons dans une société, une époque, où vous n’avez pas les mêmes conflits extrêmes du point de vue des idéologies, de la société, des conflits qui peuvent aller jusqu’à des oppositions extrêmement fortes parfois, passionnées, violentes, que pouvaient être les oppositions que nous avons traversées et vécues avec le communisme et l’anticommunisme, avec les Américains, le Vietnam, etc. Donc, aujourd’hui, une société plus apaisée, mais de sorte que le conformisme est bien plus répandu. Et je trouve que, pour ce qui est des jeunes gens notamment, il y a là un danger évident de répéter ce que les autres disent, de ce que les autres pensent, de ce que les autres formulent et cette répétition dans le conformisme est encore aggravée par l’existence d’Internet. Internet fournit une matière sans limites. C’est un trésor absolument extraordinaire. La preuve, c’est que nous travaillons en ce moment même pour un site Internet et donc une diffusion par Internet. Et en même temps, cet Internet étant justement cette source inépuisable, la tentation de tout copier, de s’inspirer de ce que l’on trouve dans la corbeille, est très grande et très dangereuse. J’ajoute que l’Internet, les blogs, le journalisme entre guillemets citoyen a pour conséquence que tout le monde se croit journaliste, tout le monde s’estime en mesure d’épancher ses humeurs sur Internet, avec cette circonstance aggravante que l’on peut signer de manière anonyme ou que l’on peut signer n’importe quoi et donc déverser, toujours sur cette immense toile, des cris, des humeurs, des passions, totalement déconnectés de la réalité du jugement, de la maturité, d’une réflexion saine sur les évènements d’actualité.
François d’Orcival est directeur de presse, chroniqueur régulier au Figaro Magazine, et membre de l’Académie des sciences morales et politiques depuis 2008. Journaliste de formation, intervenant tant dans la presse écrite qu’à la télévision, François d’Orcival est aussi passionné d’histoire.


1- Quels sont les points essentiels soulignés par François d’Orcival en ce qui concerne l’évolution de son domaine d’activité : le journalisme ?
2- Selon François D’Orcival, quel danger menace les jeunes journalistes aujourd’hui ?
3- Quel est le rôle joué par les idéologies aujourd’hui ?
4- Quel paradoxe est mis en évidence dans cette interview à propos d’Internet ?
5- Quelle critique François d’Orcival adresse-t-il à ce qu’on appelle communément le « journaliste citoyen » ?
6- La société actuelle est-elle, selon vous, plus uniforme, plus conformiste qu’auparavant ?
7- Les informations délivrées sur l’Internet par des journalistes non professionnels sont-elles, selon vous, de nature à se substituer au travail du journaliste ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire