La France a désigné un premier coupable dans le tentaculaire scandale européen de la viande de cheval alors que la police britannique a procédé jeudi aux premières interpellations dans cette affaire qui a pris une dimension sanitaire avec la découverte dans des carcasses d'un antidouleur, nocif pour la santé.
Les autorités françaises ont accusé de "tromperie
économique" la société agroalimentaire Spanghero, fournisseur de viande
des surgelés Findus, au cœur du scandale, et lui ont supprimé son agrément
sanitaire, première sanction d'importance dans ce scandale qui s'étend en Europe. Spanghero, basée dans le
sud-ouest de la France, savait qu'elle revendait comme viande de bœuf du
cheval, moins cher, selon le ministre français de la Consommation, Benoît Hamon.
"Ce trafic de viande durait depuis
plusieurs mois" et portait sur plus de 750 tonnes, dont 550 tonnes livrées
à la société française Comigel via la société Tavola, un sous-traitant qui
fabrique les plats préparés et est situé au Luxembourg, a affirmé Benoît Hamon.
Ces 550 tonnes, dont l'origine reste encore très floue, ont servi à la
fabrication de plus de 4,5 millions de produits frauduleux vendus par Comigel
dans 13 pays européens à au moins 28 entreprises, dont Findus, selon l'agence
française de la répression des fraudes. Pour sa défense, Comigel a affirmé
jeudi que la "tromperie" était difficilement détectable.
Scandale sanitaire
Le ministre de la Consommation a reconnu
que cette société, qui a fabriqué les fameuses lasagnes à la viande de cheval à
l'origine du scandale, avait été bernée. Cependant, à ses yeux, cette
entreprise française s'est rendue coupable de "négligences en omettant des
contrôles qu'elle aurait dû opérer dans son usine luxembourgeoise".
Cet énorme scandale, qui révèle la
complexité commerciale du circuit de la viande, a débouché jeudi sur des
premières interpellations, au Royaume-Uni. Trois hommes soupçonnés de fraude
ont été arrêtés : deux dans l'usine galloise de Farmbox Meats et un dans
l'abattoir anglais de Peter Boddy, des établissements qui avaient été
perquisitionnés mardi. Selon l'Agence britannique de sécurité alimentaire
(FSA), l'abattoir a fourni des carcasses de chevaux à l'usine de Farmbox Meats.
La police n'a pas précisé exactement les soupçons qui pèsent sur les trois
hommes.
Plus tôt jeudi, le scandale avait pris une
dimension sanitaire, au vu de tests effectués au Royaume-Uni. Six carcasses de
chevaux abattus dans le pays et contenant des traces de phénylbutazone, un
antidouleur proscrit dans l'alimentation, ont été envoyées en France et sont
"peut-être entrées dans la chaîne alimentaire", ont affirmé les
autorités britanniques. Le ministère de la Santé s'est cependant voulu
rassurant, estimant que la viande en question représentait un "très faible
risque pour la santé humaine". Aux niveaux auxquels la phénylbutazone a
été décelée, "une personne devrait manger 500 à 600 hamburgers par jour,
composés à 100 % de viande de cheval, pour se rapprocher de la dose quotidienne
limite pour l'homme", a assuré le ministère. L'antidouleur n'a en revanche
pas été détecté dans les produits Findus.
Affaire européenne
Jeudi, le scandale a continué à faire tache
d'huile avec deux premiers cas avérés en Allemagne de viande de cheval dans des
lasagnes censées être au bœuf. Les supermarchés Real et Edeka, plus gros
distributeur de produits alimentaires dans le pays, ont reconnu que de la
viande de cheval avait été décelée dans des lasagnes à bas prix. Les barquettes
ont été retirées des rayons. Les autorités sanitaires néerlandaises ont mené à
bien depuis lundi des contrôles dans environ 140 boucheries et supermarchés à
la recherche d'éventuelles fraudes à la viande de cheval et ont suspendu
l'activité de l'une de ces entreprises, a annoncé jeudi la vice-ministre aux
Affaires économiques Sharon Dijksma.
L'affaire, qui a éclaté en janvier et était
cantonnée dans un premier temps à de la viande hachée vendue au Royaume-Uni et
à l'Irlande, est devenue européenne avec la découverte de traces de cheval dans
des produits au bœuf, notamment des lasagnes, vendus au Royaume-Uni, mais aussi
en France, en Allemagne et en Suisse. Les autorités chypriotes ont aussi
annoncé jeudi qu'un supermarché local avait détruit par mesure de précaution 16
tonnes de steak haché.
L'Union européenne a décidé de lancer une
campagne de tests ADN dans tous les États membres et de confier à Europol la
coordination des enquêtes judiciaires, à l'issue d'une réunion de crise
mercredi soir. Outre 2 500 tests ADN à travers toute l'Europe sur les plats au
boeuf, l'UE demande aux États de procéder à quelque 4 000 contrôles pour
détecter la présence éventuelle de phénylbutazone.
Le Point. fr du 15 février 2013
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire