dimanche 27 avril 2014

La carte d'une Europe à trois niveaux qui fonctionnerait enfin





Le constat est de plus en plus partagé: alors qu'une plus grande intégration européenne est rendue nécessaire par la montée des pays-continents émergents et souhaitable pour défendre les valeurs de la civilisation européenne dans la mondialisation, les récents élargissements rendent toute évolution du projet européen lourde et hasardeuse. Le projet européen a donc besoin d'un nouveau souffle afin de réconcilier les citoyens européens avec une Europe aux contours flous, davantage perçue comme une contrainte que comme une construction positive.
La difficulté vient du fait que le projet européen est en réalité protéiforme: les différents pays composant l'Union ne visent pas le même niveau d'intégration ni les mêmes objectifs stratégiques. La construction européenne doit en prendre acte en repensant son architecture. Tandem franco-allemand, retour à l'Europe des six, renforcement de la zone Euro,… multiples sont les propositions sur la table, sans qu'aucune ne soit parvenue à s'imposer à ce jour. Pour relancer le débat et sortir des idées simplistes, il est proposé ici de structurer l'Union Européenne autour de trois cercles concentriques, répondant à trois logiques d'intégration différentes.
Le premier cercle: un noyau dur visant la convergence et la mise en commun
Pour redonner une impulsion nouvelle à une Europe qui semble aujourd'hui sclérosée, il apparaît nécessaire de se recentrer sur un cercle restreint de pays européens puissants et moteurs, un noyau dur dont l'objectif serait une convergence économique et sociale progressive et la mise en commun de nouvelles politiques.
Ce noyau dur pourrait, dans un premier temps, être constitué des principaux pays membres de la zone Euro (Allemagne, France, Italie, Espagne, Pays-Bas, Belgique), qui représentent à eux seuls, en termes de PIB, 64% de l'UE, 87% de la zone Euro et 1,3 fois celui de la Chine.
Concrètement, ce noyau dur pourrait avoir une représentation unique au sein des enceintes de l'UE, de la zone Euro et des institutions financières internationales (G20, FMI, Banque Mondiale, OMC,…) ; faire converger progressivement ses règles sociales et fiscales (avec la mise en place d'un «serpent fiscal») ; disposer d'un budget commun abondé par un impôt sur les sociétés harmonisé, certaines cotisations sociales et une partie de la TVA ; financer un système d'assurance-chômage uniformisé, des grands projets de R&D et d'infrastructures et certains coûts relatifs au vieillissement de la population.
Le deuxième cercle: une zone économique basée sur la coordination et la coopération
Si la crise a mis au grand jour les failles de la construction économique et monétaire européenne, elle a également permis des avancées considérables concernant la gouvernance de la zone Euro. Plutôt que de laisser tomber la Grèce, des outils ont été mis en place pour renforcer la solidarité et la coordination des politiques économiques entre les Etats membres.
Il s'agit, en particulier, d'éviter la mise en place de politiques économiques non-coopératives entre les Etats membres et d'achever l'union bancaire qui est un projet aussi important que ne l'était la mise en place d'une monnaie unique. Plutôt que de viser à la convergence entre des Etats qui sont aujourd'hui trop disparates, il s'agit de rédiger le règlement de copropriété de ce bien commun qu'est l'Euro.
Un Trésor de la zone Euro pourrait être mis en place, en charge de réaliser les prévisions macroéconomiques au sein de la zone, d'analyser les budgets et les politiques économiques nationales et de gérer un véritable Fonds Monétaire Européen qui serait mobilisé en cas de tension passagère sur le refinancement de certains Etats.
Le troisième cercle: un espace de libre-échange régit par l'Etat de droit
Pour définir le troisième cercle de manière positive, il faut s'appuyer sur deux conquêtes essentielles de la construction européenne: la promotion de l'Etat de droit, de la paix et des droits de l'homme et la constitution d'un vaste marché commun basé sur le libre-échange.
Ce troisième cercle symbolise, en quelque sorte, la vocation universelle de l'Union Européenne au sein du nouveau monde globalisé. Il aurait donc vocation à se rapprocher avec le Conseil de l'Europe et sa Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH) et à s'appuyer sur le Service Européen d'Action Extérieure (SEAE) dont les missions seraient recentrées sur la promotion des droits de l'Homme, la lutte contre le réchauffement climatique, la non-prolifération d'armes de destruction massive.
Sur le plan économique, en plus du perfectionnement du marché commun, ce troisième cercle disposerait de la Banque Européenne d'Investissement dont l'objectif serait de soutenir les grands projets d'investissement à l'échelle du continent ainsi que les exportateurs européens à l'international.
Ce troisième cercle ayant des prétentions universelles, il n'y a pas de raison de le limiter géographiquement a priori. Au contraire, c'est un formidable défi pour l'Europe que d'essayer de diffuser le plus largement possible la paix, l'Etat de droit et la prospérité économique, afin de «civiliser» la mondialisation, en commençant par une politique active de voisinage.
Ainsi, la question de l'élargissement de ce troisième cercle pourrait être dédramatisée vis-à-vis d'une opinion publique méfiante dès lors qu'il est bien clair que l'intégration politique relève du premier cercle et l'intégration économique du second.
Une telle évolution de l'Union Européenne est très ambitieuse mais pourrait néanmoins être acceptée en raison du recentrage sur un noyau dur qui est proposé. Plus que l'intégration européenne, c'est la dilution sans fin de l'UE et sa transformation en ogre bureaucratique que les citoyens craignent.

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