Claire est une
Parisienne qui a bien de la chance. Non contente d'habiter un rez-de-chaussée
avec cour privative et jardin derrière la butte Montmartre, la jeune femme a
le privilège, chaque matin, de pouvoir
récolter un œuf frais au saut du lit. Car depuis six mois, elle est l'heureuse
propriétaire d'une poule naine. «J'avais
envie d'un retour à la nature, explique-t-elle. Et puis cela me rappelle mon
enfance ».
Ses voisins n'ont pas tiqué. Au contraire. «
Leurs enfants sont ravis de nous rendre visite! », se réjouit-elle. Avec sa
poule en plein Paris, Claire passe encore pour une originale. Mais pour combien
de temps? L'élevage de gallinacés en ville gagne du terrain. Les jardineries
Truffaut ont vendu plus de 20.000 poussins et poules pondeuses ou d'ornement à
des particuliers en 2011. « L'activité basse-cour a augmenté
de plus de 50 % cette année », précise Pierre-Alain Oudart, chef de produit. «
Elle connaît un grand succès dans tous nos magasins en zone périurbaine.» Cela
se confirme à Toulouse, Aubagne
et Amiens, mais également autour de la
capitale, d'Herblay (95) aux abords du Stade
de France, à Saint-Denis (93). En deux ans d'existence, l'entreprise alsacienne
Eco-poules a écoulé suffisamment de poulaillers en kit pour abriter 30.000 gallinacés: « Nous
nous attendions à toucher des milieux plus ruraux », observe
Stanislas de Beaumont, son fondateur.
« Mais c'est en ceinture parisienne
que nous avons le plus de clients. Et 80
% de nos ventes se réalisent sur Internet. »
De fait, sur le
Web, on voit fleurir les échanges d'accros de la crête, soucieux d'offrir un
habitat cosy à Poupoule (200 euros pièce
en moyenne). Et les fabricants d'abris rivalisent d'idées pour se
distinguer sur un marché concurrentiel
où dominent les produits à bas coût importés d'Asie. L'argument
économique ne semble pas
prioritaire: produire des œufs moins cher sur son balcon qu'en batterie relèverait de l'exploit. En général, écologie
et retour au naturel sont mis en avant.
Ainsi, Eco-poules
vante ses structures en bois local et renouvelable et promeut l'appétit féroce
des bêtes à plumes pour les restes de
cuisine. « Une poule peut consommer jusqu'à
200 kg par an de déchets organiques. Or,
la loi « Grenelle 1 » va imposer de les recycler à 45 % en 2015 », n'hésite pas à avancer Stanislas de Beaumont. Les fientes, elles,
peuvent même enrichir l'engrais du potager...
D'autres, malins,
parient aussi sur le design, comme «
Pousse Créative », la jeune société qui a
fourni à Claire le petit habitat
esthétique et éco-conçu où niche son gallinacé. Une cabane dont on peut choisir la couleur, avec un espace
grillagé pour s'ébattre, une jardinière sur le toit où planter fleurs et aromatiques pour l'aspect campagne
en ville, et dont l'entretien est facilité par un tiroir amovible. « Un peu de litière, un nettoyage
par semaine et il n’y a pas d'odeurs », assure Claire. […]
Crainte de la
malbouffe, rejet des élevages industriels, souci pédagogique ou simple compagnie:
ce qui pousse jeunes parents et
retraités à craquer pour la cocotte n'est guère différent en France et aux Etats-Unis, où la tendance est née.
Contre toute
attente, New York, Seattle, Chicago et Los Angeles ont été pionnières dans l'autorisation des poules en ville, et le
mouvement s'étend. A Montréal, un «
Collectif en aménagement paysager et en
agriculture urbaine durable (CRAPAUD) » a lancé en 2010 une pétition pour lever l'interdiction de l'élevage
citadin ... En France, certains règlements municipaux ou de copropriété
peuvent poser leur veto. Mais, de manière générale, les poules en petit nombre
sont considérées comme des animaux
domestiques, au même titre que les hamsters.
Michel Audureau,
grand connaisseur et auteur de « Et si j’élevais une poule », , conseille
toutefois de bannir le coq et ses
tonitruants réveils (la poule n'en a pas besoin pour pondre). Puis de veiller
au bien-être animal. « Une poule a besoin de picorer, il lui faut de
la terre et un minimum de surface. Difficile
donc de l'installer sur un balcon, d'autant qu'elles sont sensibles au
froid,» Les amateurs d'œufs choisiront une
poule rousse ou une marans et, pour des coques bien dures, lui serviront des
céréales. Quand on veille au grain,
Poupoule le rend bien!
Christine Taconnet, Le
Monde, 29/12/2011
Compréhension
1.
Pourquoi
l'entreprise « Eco-poules » s’attendait-elle « à toucher des milieux plus
ruraux »?
2.
Expliquez
l’expression «accros de la crête».
3.
Ceux
qui élèvent des poules en ville le font-ils surtout pour des motifs économiques
?
4.
Est-ce
que cet élevage implique un travail pénible ?
5.
Pourquoi
un « souci pédagogique » pousse-t-il certains parents à élever des poules ?
6.
Cet
élevage est-il permis partout en France ?
7.
Pourquoi
l’élevage des coqs n’est-il pas conseillé?
8.
Expliquez
la phrase « Quand on veille au grain, Poupoule le rend bien! »
Production
·
Résumez le texte en quelques lignes.
·
Elever des poules en ville : cela est dû à
une certaine nostalgie de la nature, de la vie à la campagne, du contact quotidien avec les
animaux domestiques, d’une alimentation plus saine et plus simple. A la lumière de votre
expérience, examinez ces sentiments.
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